samedi 5 décembre 2009

Nuit blanche à Samazan ?

Jusqu'à quelle heure peut-on faire la fête ?

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Bordeaux, quartier de Paludate. Chaque fin de semaine, des milliers de fêtards s'y retrouvent. Une concentration difficile à gérer. (photo thierry david)

Selon que vous habitez dans tel département, telle ville ou tel quartier, vous goûterez plus ou moins à la nuit, ses plaisirs, ses excès et ses conséquences. Nous ne sommes pas égaux face à la fête. La géographie et les décibels le rappellent à beaucoup tous les jours.

Par exemple à ces habitants du quartier de la cour du Temple, au coeur du centre de La Rochelle. « Nous avons l'impression de vivre dans une zone de non-droit, raconte Christian Moreau, secrétaire de l'association L'Îlot des templiers. Deux établissements qui ont le statut de boîtes de nuit peuvent ouvrir jusqu'à 5 heures. Toute la nuit, il y a du bruit dans la rue, dans une parfaite illégalité. Ce sont des nuisances sonores insupportables pour les riverains, et la situation ne fait qu'empirer depuis plusieurs années. On a vu un doublement des bars en une décennie. »

Le flux dans la rue

Dans cette affaire, les autorités se disent préoccupées, et les patrons de boîte se sont déclarés dans nos colonnes rochelaises « ouverts au dialogue » en rappelant, à juste titre, que le problème essentiel ne vient pas tant de leurs établissements que du « flux de personnes dans la rue ».

L'exemple rochelais n'est pas unique. On pourrait en citer de nombreux autres à travers la région, où l'on ne compte plus les plaintes de riverains excédés ou les fermetures administratives d'établissements de nuit pour cause de nuisances diverses et variées.

L'épineux cas bordelais

La Gironde reste, cependant, le point d'orgue de la fête dans le Sud-Ouest, particulièrement dans l'agglomération bordelaise. La belle endormie s'est réveillée, pour la plus grande joie des noctambules. Elle ressemble, certains soirs, à ces villes du Sud qui semblent ne jamais dormir. Un nouvel arrêté vient d'être pris par le préfet après discussion avec les professionnels et les élus, notamment le maire de Bordeaux, Alain Juppé. Ce texte repousse à 6 heures la fermeture des discothèques, au lieu de 4 heures dans le précédent arrêté, mais conserve la fermeture des bars à 2 heures.

Plutôt bien accueillie (avec quelques réserves) par les professionnels, et critiquée par les représentants des riverains (lire ci-contre), cette nouvelle réglementation, applicable dans quelques semaines, a provoqué de multiples réactions. D'autant qu'il existe à Bordeaux une particularité : le quartier de Paludate. Près de la gare Saint-Jean et des quais, il concentre des dizaines de boîtes de nuit et draine chaque fin de semaine des milliers de fêtards. Un « concentré » de problèmes pour ses détracteurs. La possibilité, au contraire, de « mieux gérer les excès » pour David Danatividade, président de l'association de Paludate. Selon lui, repousser la fermeture à 6 heures permet une sortie étalée des boîtes et limite les nuisances dans la rue.

Différences de traitement

Le choix girondin fera-t-il école ? Ce n'est pas certain en raison de la spécificité de la situation bordelaise. Mais aussi parce que les décisions des autorités préfectorales sont variables dans la région, même dans des départements sociologiquement semblables. En Lot-et- Garonne, par exemple, le régime ordinaire de fermeture des discothèques le week-end est de 3 h 30. Pour une raison qui reste mystérieuse, puisque la préfecture n'a pas souhaité indiquer les motivations de cet horaire. Tout autour - dans le Gers, les Landes ou la Dordogne -, les fermetures de boîtes de nuit se font au contraire à 5 heures le week-end. La moyenne régionale se situe d'ailleurs entre 4 et 5 heures pour les discothèques, et plutôt près de 2 heures pour les bars.

Mais, surtout, la plupart des préfectures ont choisi de moduler les horaires d'ouverture en fonction des jours de la semaine, ou de la saison. Le cas le plus emblématique est celui du Pays basque, où les discothèques frontalières ont le droit d'ouvrir jusqu'à 6 heures l'été. On y vit déjà à l'heure (basque) espagnole, ce qui n'est pas sans poser parfois quelques problèmes (lire ci-dessous).

Dans certaines métropoles, comme Paris notamment, on a choisi de faire porter les efforts sur le respect des règles plutôt que des horaires contraignants. On y refuse aussi la concentration. Les lieux de fête sont disséminés et très contrôlables. Mais cette politique stricte vaut aujourd'hui à Paris la réputation d'une capitale recouverte d'un bonnet de nuit, par comparaison avec Londres, Berlin ou Barcelone.

Comment gérer l'alcool ?

Concilier le droit légitime des habitants des villes à dormir et la vie nocturne et festive n'a donc rien d'une sinécure. D'autant que les autorités doivent aussi arbitrer entre le commerce de l'alcool et les abus ou conséquences dramatiques liées à la boisson. Une des réponses trouvées par les préfectures est celle de la signature de chartes. En Gironde, l'ouverture jusqu'à 6 heures sera normalement subordonnée à des engagements sur l'interdiction de vente d'alcool après 4 heures. Dans le Gers, un texte a été signé par la plupart des boîtes de nuit. Il prévoit plusieurs engagements, comme la fin de la vente d'alcool une heure avant la fermeture, le prix d'entrée réduit pour ceux qui ne boivent pas, la surveillance des clients qui partent en voiture, etc.

Encore faut-il que des contrôles fréquents permettent de s'assurer du respect de ces chartes... Souvent, c'est loin d'être le cas. Mais il est au moins un point sur lequel policiers, élus, riverains et professionnels sont presque tous d'accord : la fin des afters. Ces fêtes qui débutent au petit matin après la fermeture des boîtes sont, par exemple, dans le collimateur des autorités girondines. Elles seraient source d'alcoolisation excessive et de nuisances. Mais il ne s'agit pour l'instant que d'une volonté affichée. Dans les faits, les afters ne vont peut-être pas mourir de sitôt.

Article du Journal Sud-Ouest.